Les différentes méthodes d'éducation canine
Les différentes méthodes d'éducation canine
En éduquant le chien, il s’agit de conditionner l'animal pour qu’il associe une récompense à un comportement à développer ou qu’il associe une punition à un comportement à stopper.
Le renforcement positif, R+, consiste en l’ajout d’une récompense (donner par exemple une friandise particulièrement appréciée par le chien, après qu’il se soit assis), ce qui va conforter et augmenter le comportement souhaité.
Le renforcement négatif, R-, consiste à retirer une conséquence désagréable pour le chien. Le comportement souhaité va donc augmenter.
La punition positive, P+, est l’ajout d’une conséquence désagréable pour diminuer un comportement, comme par exemple un coup de collier quand le chien tire trop sur sa laisse ou encore le collier électrique.
La punition négative, P-, consiste à retirer une récompense pour diminuer un comportement non désiré. C’est ce qu’il se passe lorsque le maître ne donne pas de récompense et ignore le chien lorsqu’il ne fait pas le comportement souhaité.
La méthode traditionnelle
La méthode traditionnelle est également connue sous le nom de méthode coercitive.
Ce type d’éducation se base sur la coercition et la combinaison entre le renforcement négatif R- et la punition positive P+ : les bons comportements permettent d’éviter des conséquences désagréables pour le chien alors que les mauvais comportements sont punis (pas uniquement ignorés).
Cette méthode est considérée comme étant l’approche éducative originelle.
Elle s’appuie sur la hiérarchie et sur la dominance, la nécessité pour l’homme de soumettre le chien.
Le pionnier et créateur de cette technique serait le colonel Konrad Most. En 1910, Konrad Most pressentait déjà les principes du conditionnement opérant (sans qu’ils soient publiés) et il a développé empiriquement, sans base scientifique, une méthode se concentrant principalement sur les exercices d’obéissance.
A la fin des années 1940, le zoologiste allemand Rudolf Schenkel a fait des observations sur des loups en captivité. Il a conclu de ses observations qu’une hiérarchie s’établissait entre les membres de la meute et que leur relation était organisée de manière compétitive :
le loup Alpha : chef et membre dominant, en charge de guider le groupe et d’assurer sa survie. C’est lui qui décide et qui mange en premier les meilleurs morceaux,
le loup Oméga : dernier membre du groupe, il est le dominé et le soumis aux autres membres. Il mange en dernier, les restes.
L’un des grands défenseurs de cette théorie, le zoologiste David L. Mech, la désavoue pourtant en 1999. Il admet que les interactions entre les loups reposent plus sur une coopération et une solidarité entre les membres du groupe qui opèrent comme une famille.
Toutefois, la théorie de Schenkel est restée populaire dans le milieu canin.
William R. Koehler a donné une grande impulsion à la technique notamment au travers de son livre "La méthode Koehler de dressage des chiens", publié en 1974.
La méthode traditionnelle est donc la méthode originelle dans le milieu cynophile puisqu’elle est utilisée pour le dressage des chiens de travail, principalement au sein des unités cynophiles de l’armée et de la police.
En France, la méthode traditionnelle a été popularisée et standardisée par les clubs canins issus de la Société Centrale Canine (SCC). Ces clubs étaient dirigés par d’anciens maîtres-chiens de l’armée et ceux-ci ont démocratisé les méthodes qu’ils utilisaient alors sur les chiens d’utilité.
Cette théorie repose sur la croyance que le processus d’apprentissage est facilité par l’autorité du maître, « chef de meute », avec une hiérarchie structurée de pouvoir, en réprimant toute initiative du chien. Le maître est encouragé à dominer le chien en utilisant des postures corporelles agressives, pour intimider, corriger les comportements indésirables.
Les méthodes ont évolué au fil du temps mais le principe reste le même : soumettre le chien. Tout écart, mauvais comportement sont sanctionnés verbalement et/ou physiquement, les bons comportements sont soit récompensés, soit ignorés. Il y a donc différents degrés dans cette méthode d’éducation : sanctions verbales, physiques plus ou moins fortes, utilisations de matériels coercitifs (collier sanitaires, collier électrique, coups de laisse…).
Le chien est contraint à obéir sous peine de punition.
L’éducation positive
Il ne faut pas réduire l’éduction positive à une méthode, plusieurs méthodes existent.
L’éducation positive s’est beaucoup développée ces dernières années grâce à l’évolution des connaissances en éthologie sur le chien. Le chien est considéré comme un être à part entière avec des émotions, des envies et il a droit au respect.
Des études récentes réfutent l’existence de hiérarchie inter-espèces tout comme l’existence de hiérarchie au sein de l’espèce canine elle-même. De ce constat s’est développée l’idée que l’éducation basée sur la méthode traditionnelle coercitive n’était plus adaptée.
Il est également possible de constater que cette évolution des mentalités et des techniques d’apprentissage a eu lieu parallèlement dans plusieurs espèces (cheval depuis une vingtaine d’années, et même au sien de l’espèce humaine).
L’éducation positive est basée sur la combinaison du renforcement positif R+ des bons comportements avec la punition négative P- pour les comportements indésirables, se traduisant la plupart du temps par leur ignorance.
Ainsi, dans ces méthodes, le chien a différentes options et c’est lui qui choisit. Sans contrainte, le chien est incité par le maître à bien faire. L’objectif de l’éducation positive est de renforcer les bons comportements du chien tout en anticipant et en éliminant les comportements non voulus.
Les récompenses jouent un grand rôle dans l’éducation positive puisque ce sont elles qui participent au renforcement positif. Plusieurs sortes de récompenses peuvent être utilisées, friandises, jouets, caresses, encouragements vocaux, …, l’essentiel étant qu’elles soient très motivantes pour le chien. Le principe est qu’en récompensant les comportements, il y a de fortes probabilités que le chien les répète.
Comme dans toute éducation, la règle inconditionnelle est la cohérence. Les récompenses doivent donc être distribuées au moment opportun et stratégique. Le timing est très important afin que le chien procède à des associations qui conforteront des comportements, en modifieront d’autres…
Systématiques au début, les récompenses seront éliminées progressivement par la suite mais elles réapparaîtront aléatoirement pour réactiver les comportements au risque d’extinction dans le cas contraire.
Les sanctions, quant à elles, punitions négatives P-, ne seront jamais violentes ni coercitives. Outre le fait que le maître ignore le comportement indésirable, il est également possible de rediriger le chien vers un comportement qui sera ensuite renforcé. Par ces techniques, le chien est donc poussé à choisir le bon comportement et à éliminer de lui-même les mauvais.
Les techniques utilisées dans l’éducation positive amènent donc le chien à être acteur de son apprentissage. Il n’est plus dans la réaction, il est dans l’action. Maître et chien sont partenaires et la cohabitation entre eux passe par les bons outils de communication.
La méthode naturelle
Joseph Ortega, ethnologue, est le créateur de la méthode d’éducation dite naturelle, au début des années 1980.
Il a élaboré sa technique après l’observation de meutes de loups sauvages et notamment l’observation de la mère qui lorsqu’elle revient de la chasse émet un signal auquel accourent immédiatement les louveteaux. De là, il conclut que pour survivre, il faut se nourrir. Les louveteaux ne quittent plus les faits et gestes de leur mère du regard, réagissent instinctivement au moindre de ses mouvements : elle lève la tête, les louveteaux se lèchent les babines et s’assoient, elle se couche, ils restent fixés sur ses flancs, leur tête tournée vers elle… En résumé, leurs instincts primaires guident leurs comportements.
Joseph Ortega a transposé ces observations au chiot et au maître : il suffit que le maître ait un jouet pour chien ou une friandise entre les doigts pour que la motivation soit identique à celle des louveteaux et qu’il ait toute l’attention du chiot. Il peut alors faire faire ce qu’il souhaite à l’animal, le faire asseoir en levant la friandise ou le jouet, le faire marcher au pied en gardant la récompense contre le museau du chiot. Les instincts primitifs du chiot le guident ici aussi. Ces tendances innées seront le moteur de l’éducation du chien, il apprend sans le savoir.
La méthode d’Ortega se fonde sur de nombreux principes de l’éthologie moderne :
le respect du chien et de sa personnalité. Ses comportements naturels sont utilisés sans lui imposer la moindre contrainte. Le maître doit également faire preuve d’empathie et savoir se mettre à la place de l’animal en essayant de penser comme lui pour comprendre ses réactions (désirs et réticences) et les anticiper,
l’utilisation des tendances innées : la nourriture, le jeu et les jouets du chien, l’imitation, les signaux positifs du maître (félicitations, caresses, …), mais également les situations agréables pour le chien (départ de promenade…),
la motivation du chien : si le chien désire avoir quelque chose d’agréable, une friandise ou son jouet fétiche, il va se montrer très motivé. Plus sa motivation est forte, plus le chien apprend vite et naturellement. L’idée sous-jacente est qu’il n’existe aucune action sans motivation, que ce soit chez l’être humain ou chez l’animal. La motivation n’est pas l’intelligence ou la raison, mais elle est basée sur un besoin intérieur, un désir fort, et est activée par un signal précis qui mobilisera toute l’attention de l’individu et le poussera à l’action afin d’accomplir son besoin. La méthode naturelle utilise ce besoin puissant chez le chien pour atteindre les objectifs désirés par le maître ou l’éducateur canin,
l’apprentissage cognitif : il s’agit de l’apprentissage et de l’acquisition de la conscience des évènements de l’environnement et la représentation d’un évènement ou d’un objet par l’intelligence et la cognition du chien. Avec la méthode naturelle, le maître éduque son chien en posant des problèmes simples que celui-ci doit résoudre en utilisant tous ses sens, comme par exemple la recherche de son jouet sous plusieurs cônes.
La méthode naturelle propose de commencer l’éducation bien avant les 6 mois ou les 1 an du chien, comme cela est la norme dans les clubs d’éducation canine utilisant la méthode d’éducation classique ou la méthode d’éducation positive. Dès le pré-sevrage des chiots chez l’éleveur, vers la quatrième semaine, la méthode d’éducation canine naturelle peut être mise en place. C’est en effet à cet âge que la notion de motivation apparaît, comme par exemple avec les premières gamelles du chien ou ses premiers jouets, objets de jeu… Vers sa septième semaine, période où ses récepteurs sensoriels sont les plus sensibles, le chiot mémorise les références du milieu dans lequel il vit. Il se servira de ces références plus tard. Dès l’adoption, le maître doit donc prendre la relève de l’éleveur pour forger en douceur les bases de son éducation.
En général, en une seule séance, le chiot de deux ou trois mois est capable d’apprendre les ordres assis, couché, le rappel et la marche au pied, le tout sans laisse, grâce à la méthode naturelle.
Les accessoires pour chien (collier, laisse…) sont inutiles avec cette méthode puisqu’elle est entièrement basée sur la confiance et la complicité entre le maître et le chien.
Concernant la pratique, soit on provoque le comportement voulu du chien en lui faisant exécuter une action, en associant alors l’ordre au mouvement puis en le récompensant afin qu’il fasse l’association entre mouvement, ordre et récompense, soit on profite des comportements spontanés du chien et dès que celui-ci fait de lui-même un comportement que le maître souhaite lui apprendre, il lui en donne l’ordre puis le félicite.
Comme dans l’éducation positive, la punition positive n’existe pas. Le chien exécute correctement l’ordre donné, il est récompensé, s’il ne l’exécute pas, il n’est pas sanctionné mais il est ignoré. Le chien comprendra alors que son intérêt réside dans l’obéissance et il fera alors ce que le maître attend de lui.
Pour autant, même si en éducation naturelle il n’y a jamais de punition du chien, la hiérarchie sera établie dès le troisième ou le quatrième mois du chiot, comme chez les louveteaux. Le maître apprendra à son chien les interdits que ce dernier doit connaître, et initiera les exercices de hiérarchisation, comme mettre la main dans la gamelle, fermer le museau du chien,...
Le clicker training
Le clicker training peut être considéré comme une technique découlant de l’apprentissage
« essai-erreur ». La récompense est synchronisée avec le comportement désiré.
Les débuts du clicker training remontent aux années 1940 avec deux étudiants du professeur Skinner (conditionnement opérant), Keller et Marion Breland. Leurs travaux se portent sur les chiens. Dans les années 1950, Keller Breland teste cette méthode sur les mammifères marins, comme le dauphin. Grâce à cette méthode, les dauphins réalisent des numéros impressionnants sans aucune contrainte. Le sifflet à ultra-sons a d’abord été utilisé puis le clicker.
Karen Pryor a généralisé la méthode du clicker training à d’autres espèces animales, comme le chien, le cheval, les poules, les oiseaux…
Cette méthode permet encore de nos jours aux soigneurs des zoos et parcs animaliers de pratiquer des soins sur les animaux, toujours sans l’usage de la contrainte.
Le clicker est un petit boîtier avec une languette métallique qui émet un son bref lorsque l’on appuie dessus.
Le principe est le suivant :
Le chien apprend qu’un clic égale une récompense. Au début, le clic ne signifie rien pour le chien. L’association du clic et de la récompense va conditionner le chien. Celui-ci le comprend vite et va tout faire pour obtenir un clic donc une récompense.
Le chien propose un comportement : s’il s’agit du comportement attendu, clic et récompense.
Le timing est essentiel : le clic doit avoir lieu au bon moment, trop tôt ou trop tard et ce n’est pas le bon comportement qui risque d’être récompensé.
Cette méthode permet l’apprentissage de commandes complexes chez le chien. Elle donne des résultats rapides.
Toutes les méthodes d’éducation canine fonctionnent, donnent des résultats mais encore faut-il en connaître les raisons et les conséquences pour l’animal.
Tout est une question de nuance et d’objectif. Si l’objectif est le bien-être de l’animal, la méthode traditionnelle, coercitive n’est pas adaptée, contrairement aux méthodes d’éducation positive et d’éducation naturelle.
L’éducation positive propose des méthodes modulables et adaptables en fonction de la personnalité du maître et de son chien.
Plus que les accessoires, c’est la méthode employée pour les utiliser qui est la plus importante. Respect de l’animal, cohérence, bienveillance, …, doivent animer l’ambition de réussite et de coopération mutuelle.
Et tout débute par la compréhension du fonctionnement du chien et de la communication réciproque.